vendredi 14 novembre 2014

L'interview d'Igor Strelkov (partie 1)

Interview d'Igor Strelkov : «On a fait 17 kilomètres en marche à travers la frontière». (1ère partie)

13 novembre 2014

Igor Strelkov répond aux questions de Sergueï Chargounov

Sergueï Chargounov : Igor Ivanovitch, quelle sera la suite des évènements pour les républiques de Donetsk et de Lougansk ? Elles existeront bien ou leur avenir sera plus qu’incertain ? 

Igor Strelkov : J’espère vraiment qu’elles existeront malgré tous les obstacles et la situation extrêmement dure dans laquelle elles se trouvent actuellement. J’espère que la Novorussie existera bien. En tant qu’un état uni allié de la Russie. 

S. C. : Il y a eu "le printemps russe" comme on a appelait ce qui s’est passé en début de l’année en parlant du retour de la Crimée à la Russie sans qu’on verse une goutte de sang. Ensuite, il y a eu "l’été russe" avec de nombreuses personnes tuées au Donbass. Maintenant, c’est "l’hiver russe" qui arrive. Donbass peut se retrouver en situation d’une véritable catastrophe humanitaire. Est-ce vrai ? 


I. S. : Il est déjà en situation d’une véritable catastrophe humanitaire. Surtout dans les régions avoisinant la ligne de front. Lorsqu’on évoque ce qui se passe au Donbass, il ne faut pas oublier que c’est la guerre. Après cette soi-disant "trêve de Minsk" qui n’a jamais existé que sur le papier et ne profitait qu’à la seule partie ukrainienne – en aucun cas au Donbass ni à la Russie – il n’y a pas eu depuis, un seul jour d’accalmie au front. Tandis qu’aujourd’hui, lorsque la partie ukrainienne a renié quasi ouvertement les conditions des accords de Minsk, la situation y est très alarmante. Donetsk est pilonné comme elle ne l’a jamais été avant Minsk. Ce sont des pilonnages sévères sans interruption. Ainsi que de toutes les autres agglomérations. En fait, tout le territoire de Donetsk et de Lougansk est balayé de bout en bout, sauf peut-être, des villes profondément en arrière comme Antratsit. 

S. C. : Depuis votre départ recevez-vous des informations sur ce qui se passe ? 

I. S. : Évidemment

S. C. : Vous avez des sources faibles là-bas ? 

I. S. : Je reçois quotidiennement des infos par mail et par téléphone. Je ne dirai pas que les commandants des unités et les hommes politiques me rapportent, puisqu’aujourd’hui je ne suis plus leur chef, mais ils ont à cœur de me mettre au courant de tout ce qui se passe.

S. C. : Selon vous, la reprise des hostilités à grande échelle est-elle possible ? 

I. S. : Mais c’est bien ce qui se passe là-bas en ce moment. Simplement, c’est une guerre des positions. 

S. C. : Je parle des mouvements des chars, etc.… 

I. S. : Elles sont inévitables, simplement inévitables. La partie ukrainienne ne l’a jamais caché, même durant le cessez-le-feu de Minsk, son intention de reprendre le Donbass sous sa dictature. Et elle s’y affairera. Ensuite, ce sera le tour de la Crimée. Tous nos hommes politiques qui nous parlent sérieusement des quelconques accords, de la trêve avec la partie ukrainienne, nous mentent délibérément. En premier lieu, je considère que ce sont ceux qui sont responsables de ces accords de Minsk qui nous mentent. Ils savent parfaitement que la partie ukrainienne n’acceptera jamais, jusqu’à son anéantissement militaire total, le départ de la Novorussie. Mais ils mentent sciemment compte tenu de leurs intérêts tactiques qui n’ont rien à voir avec les intérêts de la Russie et de la Novorussie.

S. C. : Pendant le siège de Slaviansk, vous vous êtes transformé en un symbole. Et vous restez toujours un homme-légende pour plusieurs. Vous y étiez préparé ?

I. S. : Pas du tout. De plus, devenir une personne jouant d’une quelconque célébrité publique n’a jamais fait partie de mes projets. Admettons que lorsque l’épopée de Slaviansk a démarré, je comptais agir exactement comme en Crimée, car il y avait un espoir que les évènements suivront le scénario de Crimée. Ainsi, on prévoyait donner un coup de main aux leaders locaux et aux miliciens pour établir le pouvoir du peuple, organiser un referendum, se rattacher à la Russie, ce qui était notre objectif commun et leur propre objectif en premier lieu. Que personne ne leur a imposé, c’était leur désir sincère. Ensuite, sans sortir de l’ombre, je devais disparaître, comme j’ai disparu de la Crimée. 

S. C. : La Crimée, je vais encore y revenir. Comment aujourd’hui ressentez-vous votre célébrité ? Elle vous pèse ? Quelque chose a changé en vous ? 

I. S. : Au début, lorsqu’un tel besoin crucial s’est posé et, disons, on m’a vivement recommandé de m’exposer, j’en ai ressenti une gêne, une gêne colossale, puisque tout au long de mon service, je me suis habitué à rester une personne non publique. J’avais l’habitude d’agir, de prendre des décisions, et c’est un cercle très restreint de personne qui était au courant de mes fonctions antérieures, quelles étaient les opérations auxquelles j’avais participé et les détails de celles-ci. Ainsi, j’étais très gêné, mais aujourd’hui je me suis un petit peu habitué à cette attention venant des médias. Plus encore, j’accepte d’être en contact avec eux, non pas pour me faire une notoriété, mais dans les intérêts de notre mouvement.

S. C. : Le mouvement s’appelle "La Novorussie" ? 

I. S. : Oui, le mouvement "La Novorussie" par lequel nous espérons regrouper toutes les forces publiques non gouvernementales qui veulent réellement aider la Novorussie, coordonner leurs actions pour que celles-ci soient au maximum efficaces.

S. C. : Il s’agit essentiellement d’un support humanitaire ? 

I. S. : Il s’agit exclusivement d’un support humanitaire. Nous prévoyons en premier lieu aider par des habillements, des équipements, des ravitaillements, toute sorte d’approvisionnements non combatifs. Ensuite, c’est le soutien aux combattants des FAN eux-mêmes et aux membres de leurs familles qui sont loin d’être en meilleure situation. Un autre axe d’activité important : l’aide aux blessés qui est extrêmement insuffisant. Bien plus encore, les républiques de Donetsk et de Lougansk n’ont pas les moyens de les aider réellement. Alors que les blessés après s’être fait soigner, surtout ceux qui ont été mutilés, se trouvent en situation alarmante : ils ne touchent pas de pensions, de traitement, rien. Ainsi, sur le territoire russe ils n’ont aucun statut non plus. Mais la plupart se fait soigner ici, et nous tâchons de prendre à notre charge le maximum d’aide aux gens ayant défendu la Russie et ayant beaucoup sacrifié pour sa défense. Ensuite, l’aide aux familles des personnes mortes au combat. Et encore une composante : informationnelle. Nous n’y renonçons pas. Nous estimons que l’idée de la Novorussie a extrêmement besoin d’être soutenue. On essaye de nous baratiner, pour niveler le problème de l’existence de la Novorussie et faire semblent que la population des oblasts de Lougansk et de Donetsk s’est soulevée pour marchander certains droits. C’est faux, la population des oblasts de Lougansk et de Donetsk s’est soulevée pour le rattachement à la Russie. Et lorsque, pour certaines considérations d’ordre de politique extérieure, la Russie a renoncé à leur rattachement suivant le modèle de la Crimée, ils se sont mis à contrecœur à combattre pour leur souveraineté. Pour la souveraineté en coalition avec la Russie. 

S. C. : Vous n’avez pas de projets d’y retourner ? 

I. S. : En ce moment, mon retour y est impossible. Plus encore, il n’est pas opportun. Je peux vous expliquer pourquoi. Vous comprenez, dans la situation qui s’est créée, ma figure est inacceptable pour Kiev. Tant que l’on continue à négocier avec Kiev, en dépit de bon sens. Tant que la composante gazière importe plus que les vies des millions de Russes, mon retour est impossible… Il sera accueilli par de soi-disant partenaires de manière très négative. Plus encore, actuellement à la tête des deux républiques se sont trouvées des personnes qui ne vont pas bien prendre mon retour. Ne serait-ce que parce qu’il existe un important mécontentement dans l’armée des deux républiques, et mon apparition, même en tant que simple soldat non gradé, peut devenir un aimant qui attire tous les mécontents. Premièrement, moi-même, je ne le souhaite pas. Deuxièmement, je considère que ce serait destructeur, quels que soient les qualités ou les défauts des leaders. Je ne connais pas Plotnitski, Zakhartchenko, je le connais assez bien. C’est un vaillant commandant. 

S. C. : Vous l’avez connu là-bas ? 

I. S. : Oui, à Donetsk. 

S. C. : C’est-à-dire, après Slaviansk ? 

I. S. : Bien sûr. Il n’a pas été à Slaviansk. Mais j’ai un avis négatif sur certaines de ses décisions, notamment des accords de Minsk. Néanmoins, je pense que dans de conditions des actions militaires, aucune opposition n’est acceptable, surtout une opposition armée. En comprenant que mon retour à Donetsk provoquerait une situation de dyarchie, je ne peux pas y retourner sans y être mandaté.
À suivre....



Source : fr.novorossia.today

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